Dossier - Compte rendu de course UTMB 2010

Comme bon nombre de prétendant à l'UTMB®, je n'ai pas été retenu pour la 8ème édition de The North Face® Ultra-Trail du Mont-Blanc® mais qu'importe la TDS (Trace des Ducs de Savoie) est aussi une belle course qui foule les pieds du géant Mont Blanc.
Aprés 2 participations à l'UTMB, 2 fois finisher, je serais en lice pour me faire plaisir sur ce beau tracé, malgrè une météo qui s'annonce exécrable, la montagne ne s'apprivoise pas comme cela. Il faudra une belle motivation cette année pour boucler sa propre boucle.










"La montagne n'est ni juste, ni injuste. Elle est dangereuse "
Reinhold Messner

                                                          


18h41 Le dernier concurrent quitte la zone de départ pour la grande boucle de The North Face® Ultra-Trail du Mont-Blanc® allias UTMB® -  alors que les premiers sont déjà en course depuis 11 minutes. Moi je suis inscrit sur le TDS (Sur la Trace des Ducs de Savoie) ultra trail long de 106km.

Il pleut à nouveau. La météo n’est pas avec nous. L’organisation nous a prévenus ce matin par SMS que la pluie, le vent et le froid seraient au rendez-vous de cette 8ème édition. De retour à ma voiture la pluie s’intensifie, les cieux se déchaînent.
Pour nous, coureurs de la TDS (Sur la Trace des Ducs de Savoie), le départ sera donné à minuit à Courmayeur.
Les premières navettes, qui vont acheminer  les coureurs au départ  en Italie, quittent la vallée de Chamonix sous des seaux d’eau. Je serai du dernier voyage à 22h. D’ici là, il faut s’occuper et surtout garder le moral un peu en berne.
Un dernier coup de fil à mon cher papa qui se trouve du côté de Bourg Saint Maurice, pour connaître la météo à mi-parcours car je crains la descente de Bonneval sous la pluie. Ce n’est pas dans mes habitudes, mais, même après avoir terminé à deux reprises la grande boucle de l’UTMB®, je lui parle d’un éventuel abandon en cas d’orages trop violents car pour le moment il faudrait un miracle pour que ce déluge s’arrête.
21h. 
La pluie frappe violemment la tôle de ma voiture. Je me prépare doucement. Je vérifie une dernière fois mon sac à dos. Je pensais faire la course avec une ceinture porte-bidons comme en 2009 c’est tellement plus facile pour gérer le liquide, mais il faut optimiser le matériel avec ces conditions spéciales. Je peux ainsi ajouter un deuxième tee-shirt manches longues en cas de coup dur et de froid. Je le place dans une pochette plastique pour alimentation. D’ailleurs chaque chose est sous plastique : argent, piles de rechanges, gants de soie, gatosport, téléphone, Kleenex, 2 tee-shirts.
Je change la carte Sim de mon téléphone. J’utilise un ancien modèle, moins volumineux et plus léger que mon écran tactile. Et surtout, il peut prendre la pluie sans que cela soit trop gênant. La veste aussi sera différente. Souvent je prends le départ avec un coupe-vent gros comme le poing une fois replié. Mais là je préfère jouer la sécurité et aussi le confort pour cette fois je prendrai donc une veste plus épaisse.
Il est l’heure de rejoindre le bus. Il ne pleut plus, le miracle n’est peut être pas loin finalement. C’est à ce moment que l’on m’informe que la course est décalée de minimum 3 h, voir annulée. Dépité je me retrouve au milieu des autres coureurs dans le gymnase de Chamonix. Certains devaient prendre les bus de 21h. Je décide alors de retourner à ma voiture pour mieux me reposer et prendre mon mal en patience.
Les infos arrivent par SMS. A 2h du matin, nous apprenons que ’’TDS/UTMB® bis confondus se verraient regroupés pour un nouveau départ à 10h à Courmayeur’’.
Pourquoi UTMB® ? Il faut croire que la course a été stoppée, ce qui ne m’étonne pas étant donné les conditions climatiques. Mais ce n’est que 3h plus tard que nous apprendrons que 1000 places seront disponibles. Je peux enfin dormir un peu.
Samedi matin. 6h. Ce n’est pas avec le sourire que j’ouvre les yeux car il pleut beaucoup. Pourquoi prendre le départ alors que s’il pleut comme ça sur le parcours, je suis convaincu  de ne pas pouvoir finir cette TDS tronquée. Même si ça se passe bien, les pieds vont trop souffrir. Je ne suis pas un canard …
Et puis, m…on verra bien, je décide de m’aligner quand même.

En route vers Courmayeur


C’est le soulagement quand le bus sort du tunnel du Mont Blanc, car il fait beau sur Courmayeur. Nous retrouvons les concurrents qui ont pris les  premiers bus. Ils ont passé la nuit au gymnase et semblent aussi dans le même piteux état que moi. Nous sommes dans la salle où, habituellement, arrivant du col de la Seigne, nous sommes heureux de pouvoir nous reposer un moment et de manger des pâtes même à 7h du mat, car c’est la mi-course de l’UTMB®.
La grande boucle a été stoppée hier soir. L’organisation a ainsi pu changer le menu et nous accueillir avec un petit déjeuner préparé en urgence, car en aucun cas il n'était prévu que nous soyons là à cette heure-là. Le Gatosport qui devait être avalé hier soir, est le bienvenu pour le petit déj.
Nous coureurs, nous avons nos soucis. Courir sous la pluie, vaincre le froid… Nous venons de passer la nuit dans des gymnases, des voitures, des tentes…Tous cela n’est rien, comparé à l’organisation qui a dû faire face à l’arrêt brutal de la grande boucle et de la CCC® (Chamonix-Courmayeur-Chamonix) pour raisons de sécurité. Il fallait rapatrier tout le monde. Préparer un deuxième départ pour l’UTMB® et faire partir La TDS. Et en plus, il y a le petit déjeuner, quel luxe…
Les montagnards savent que la météo change très vite en altitude. Il faut savoir que l’année dernière, nous étions environ 15 coureurs à tourner en rond pendant 30 minutes au sommet du Col du Bonhomme alors qu’il n’y avait seulement que du brouillard.

Le dernier bus arrive. Environ 250 coureurs n’ont pas répondu à l’appel. Il y avait seulement 1500 places de disponibles pour ne pas transformer la montée de Bertone en un monstrueux bouchon, 1239 traileurs motivés se présenteront sur la ligne de départ de cette UTMB® et TDS de reprise.
Coureurs de l’UTMB® et de la TDS sur la même ligne, le départ est donné avec quelques cadors qui ont répondu présents à l’appel. Très vite il faut prendre l’allure de croisière et ne pas s’emballer. La traversée du Val ferret  est toujours aussi magique. La masse imposante de la chaîne du Mont Blanc se déroule à notre gauche, jusqu’au moment où en bas dans la vallée, un arc en ciel fait son apparition. Le paysage est grandiose, mais il faut garder les yeux sur le chemin. Devant nous, la montée du Grand Col Ferret. Enfin, une partie seulement, car le sommet se trouve sous un nuage bien trop gris à mon goût.
En effet, il pleut légèrement dans l’ascension et ça glisse. Rien à voir avec les pluies torrentielles de la veille.
La longue descente vers la Fouly commence. Une portion du parcours a été modifiée pour notre sécurité à la dernière minute. J’aperçois le balisage sur l’autre versant. Nous évitons ainsi un passage que j’avais trouvé relativement impressionnant même par temps sec.
Les ravitos s’enchaînent. Il faut prévoir à l’avance ce qui doit être fait. Un sanglier, un chamois, des marmottes…non, non, ce ne sont  pas des hallucinations comme celles que l’on peut avoir lors de la deuxième nuit de l’UTMB®. Ce sont bien des sculptures, taillées dans les troncs des arbres le long du chemin qui monte à Champex.
 La suite est beaucoup moins réjouissante car la terrible montée de Bovine nous attend. Il ne pleut plus, c’est déjà ca ! La nuit tombe au sommet de Catogne. Le faisceau de la lampe se perd dans un épais brouillard, c’est pas vraiment agréable.
A Vallorcine, il reste encore du chemin à parcourir et je sens qu’il va faire froid. Je prends donc le temps de manger et en profite pour me changer et mettre mon premier tee-shirt manches longues bien sec. Je garde de très mauvais souvenirs de mes deux passages précédents, de Vallorcine au Col des Montets ; je suis donc sur mes gardes. Le tracé empreinte un chemin le long d’un torrent, c’est glacial. Un coup d’œil aux SMS envoyés par les amis qui suivent la course depuis leur canapé. Je pourrais les envier, mais non. Nous sommes vraiment des cas à part quand l’on se lance dans ce genre de défi physique…
Tête au vent : pas de vent ! Ni de pluie, et pas de « bobos » non plus. Je savoure cette fin de course, car même s’il reste 10 km environ de chemins, dans ma tête c’est le bonheur de finir une course à « Cham » et le tout sans problèmes, ce qui n’est pas rien. Les deux UTMB® précédents se sont terminés avec la polaire de finisher en cadeau mais aussi avec une tendinite en 2008, puis une entorse l’année d’après.
Revenons à la course ; j’arrive à la « buvette » de la Flégère. Je ne m’arrête pas. La visibilité dans la descente est médiocre. Je décide de marcher d’un pas rapide alors que d’autres tentent la descente en courant. Ils se calment vite dès les premières pierres et racines qui entravent les foulées. C’est en alternant course à pied et marche que je rentre dans Chamonix. La visibilité était bonne sur la fin mais les jambes ne sont plus là.
Il est 2h du mat’. C’est fini je suis à Cham.
Nico et Julie, 2 amis sont là. Madame Poletti la directrice de course aussi est là pour accueillir chaque coureur qui passe la ligne d’arrivée. J’ai faim, j’ai froid, mais surtout : même pas mal. Si, aux cuisses. Dans 3 jours je trotterai à nouveau.


Une Organisation irréprochable



« Bravo ! » : ce mot, comme tous les coureurs,  je l’ai entendu tout le long du parcours et en plusieurs langues. Mais je dois dire bravo à mon tour à l’organisation et aux bénévoles. Critiquer,  c’est facile et des critiques il y en a lorsque l’on décide d’annuler ou de modifier une course de ce calibre. Nous avons eu des conditions météorologiques très difficiles. La montagne est un merveilleux terrain de jeux, seulement quand il fait beau. C’est vrai que j’étais sur la TDS et pas sur l’UTMB®, c’était mon choix. Les infos par SMS sont arrivées à l’heure…. Certains ont le sentiment d’avoir perdu du temps et de l’argent. Mais aujourd’hui nous sommes là, car les bonnes décisions ont été prises aux bons moments, et cela vaut tout l’or du monde. Et si tu as un doute, pense à tes proches pour qui tu comptes…c’est en tout cas ce qui a nourrit ma réflexion lorsque le verdict est tombé

A l’année prochaine CHAMONIX !!

Jean Louis Falquy
Dossard 9197